IDENTITéS

Quel point commun y a-t-il entre Pierre Perret, chanteur-poète populaire français et Bruno Nassim Aboudrar, maître de conférences en esthétique à la Sorbonne Nouvelle ? Ils se sont tous les deux rendus célèbres par leur intérêt pour le membre viril...

Le premier par une chanson célébrissime qui disait « tout, tout, tout sur le zizi » et le second par un essai académique intitulé « De la verge, et sa représentation dans les beaux-arts et les sciences de l’homme ».

Rien d’étonnant toutefois de la part de M. Aboudrar qui quête le Beau dans ses moindres manifestations, surtout quand elles sont le fruit des passions et de l’intelligence humaines réunies. Sachant qu’en l’occurrence, explique la note de présentation de cet ouvrage paru en 2006 aux éditions du CAIRN : « Dans la tradition artistique occidentale, la représentation de l’appareil génital masculin fait partie intégrante de l’ordre esthétique du nu : il n’y a pas d’académie sans représentation du sexe masculin. Mais comment représenter celui-ci ? Il en va, en effet, du pénis, un peu comme de l’enfant selon Diderot : « [c’] est une masse informe et fluide qui cherche à se développer ». Ce problème formel, auquel Léonard de Vinci prête déjà attention dans ses Carnets, connaît des solutions artistiques diverses, de la stylisation (chez David, par exemple) au « portrait » (chez Delacroix ou, auXX^esiècle, chez Lucian Freud). Parallèlement, l’aspect de la verge – ce qui en est représentable, sinon présentable – fait l’objet d’investigations scientifiques surprenantes au tournant desXIX^eetXX^esiècles dans le contexte d’une morphopsychologie appliquée à la médecine légale. Ces deux directions, scientifique et esthétique, qui recouvrent les voies désignées par Freud comme étant celles privilégiées de la sublimation  ».

En 2009, le chercheur change son fusil d’épaule pour se frotter à l’art du roman. Après les difficultés de l’analyse critique, il s’essaie courageusement à celles de la création artistique. Réussissant au passage à convaincre les éditions Gallimard qui publient « Ici-bas », son premier roman, faisant de lui l’un des écrivains que les visiteurs du SIEL étaient invités à rencontrer dans le cadre des animations littéraires et non moins commerciales du 16^e Salon du Livre de Casablanca.

Dans « Ici-bas », nous dit-on, le lecteur suit l’histoire de deux familles, l’une marocaine, l’autre hongroise, que rien n’aurait dû rapprocher mais dont l’Histoire et la musique vont faire se rencontrer deux descendants.

Avec, imprimé en gros caractères sur le panneau promotionnel exposé bien en évidence dans le stand « La France au SIEL » de son diffuseur marocain, une précision en guise de mode d’emploi.

« Le Maroc que l’auteur y peint est une vraie création littéraire car si son nom même est bien marocain Bruno Nassim Aboudrar est un vrai parisien : « Les passages qui portent sur le Maroc dans [son] roman sont profondément fictionnels et fictifs, et plongent leurs racine dans un substrat décomposé de souvenirs, de lectures, de films et d’imagination – ils ne prétendent à aucune vérité biographique ou historique. »

Mais comme Bruno Nassim est chercheur avant tout et que la beauté est plus que jamais son verre de thé, il travaille actuellement sur le voile musulman et son usage dans l’art contemporain.

Une façon, sans doute, de désamorcer le débat récemment ouvert par ceux qui pensent que le voile musulman est la cause, en France particulièrement, d’un bel embarras…